Crédit COVID-19 et comptabilité

Le 25 mars 2020, le Conseil Fédéral a arrêté « l’Ordonnance sur l’octroi de crédits et de cautionnements solidaires à la suite du coronavirus ». Dès cette date et jusqu’au 31 juillet 2020, les entreprises qui en font la demande peuvent obtenir un « CREDIT-COVID-19 » garanti par la Confédération à 100% jusqu’à hauteur de CHF 500’000 et 85% sur les crédit entre 500’000 et 20 millions de francs. Le montant du crédit qu’une entreprise peut obtenir est limité au 10% de son chiffre d’affaires annuel.

Le commentaire de l’ordonnance, dont vous trouvez le lien ci-dessous, précise que les cautionnements solidaires sont accordés uniquement pour des crédits destinés à pallier les difficultés de liquidité courantes et, par conséquent, qu’aucun fonds ne doit être utilisé ou que des garanties ne doivent être fournies pour des engagements financiers existants ou nouveaux, si ces moyens ou ces garanties ne sont pas impératifs pour le maintien de l’exploitation opérationnelle. Les versements aux actionnaires (et aux sociétés qu’ils contrôlent) en leur qualité d’associés ne sont donc pas autorisés.

Comment présenter ce crédit dans les comptes annuels ?

Inscription au bilan

Le crédit Covid-19 est une dette et doit être inscrite en tant que telle au bilan.

Mention dans l’annexe

Les diverses conditions et restrictions liées à la convention de crédit cautionné doivent être indiquées dans l’annexe (montant, durée, taux d’intérêt, restriction en matière d’investissement, interdiction de distribution de dividende, restriction concernant l’octroi ou remboursement de financement aux actionnaires, etc.).

Perte de capital et surendettement

L’article 24 de l’ordonnance précise que les crédits Covid-19 jusqu’à CHF 500’000 ne sont pas considérés comme des capitaux étrangers jusqu’au 31 mars 2022.

 A quoi les dirigeants des entreprises doivent-il faire attention durant la durée de ce crédit ?

Est-ce que nous pouvons distribuer un dividende durant la période de crédit ?

Non, l’article 6 de l’ordonnance indique explicitement cette interdiction. Dès la date de la demande de crédit Covid-19, il est formellement interdit de distribuer un dividende.

Cela veut dire que, pour les comptes arrêtés au 31.12.2019 établis après la demande de crédit, il n’est pas possible de prévoir la distribution d’un dividende. Pour les comptes au 31.12.2019 établis avant la demande de crédit Covid-19, la proposition et la décision de la distribution de dividende reste valable. Cependant, le versement ne pourra avoir lieu qu’après le remboursement intégral du crédit de cautionnement.

Est-ce qu’il est possible de rembourser un prêt accordé à un actionnaire avant la date d’octroi du crédit

Non, un prêt à un actionnaire représente un refinancement inadmissible. Il en va de même des prêts intragroupes.

Est-ce possible de verser des tantièmes ?

Non, c’est interdit. L’article 6 de l’ordonnance précise son exclusion.

Est-ce qu’il est possible d’octroyer un prêt aux actionnaires et associés ou un refinancement de prêt ?

Non, il est exclu de faire ce genre d’opération durant la durée du crédit de cautionnement solidaire.

Est-il possible de rembourser un prêt d’actionnaire en ayant obtenu un prêt Covid-19 ?

Non, l’ordonnance précise qu’il est exclu d’octroyer ou de refinancer un prêt à des actionnaires.

S’il y a l’existence d’un contrat de prêt avec l’actionnaire, mentionnant un remboursement annuel, il ne sera pas possible d’honorer ce contrat, l’ordonnance fédérale étant considérée comme « loi », elle surpasse les effets du contrat de prêt.

Il en va de même du remboursement de prêts intragoupes ainsi que du transfert de fonds à une société du groupe n’ayant pas son siège en Suisse, qu’elle soit liée directement ou indirectement au détenteur du prêt Covid-19.

Est-il possible d’effectuer des nouveaux investissements qui ne remplacent pas un actif existant ?

Non , c’est exclu car l’article 6 al. 2b de l’ordonnance le précise. La question pourrait se poser sur le mode de financement : si un crédit d’investissement a été octroyé par une banque spécifiquement pour cet achat, le prêt Covid-19 cautionné ne sera pas détourné de son but et ne servira pas à payer cet investissement. Cela devrait être possible.

Est-il possible de verser un bonus ou un salaire complémentaire pour les actionnaires ?

Ce n’est pas précisé exactement dans l’ordonnance. Cependant, cela semble pareil à une distribution de dividende cachée. Ce salaire serait considéré comme une distribution dissimulée de bénéfice et il y aurait infraction à la loi.

Disposition pénale

L’article 23 de l’ordonnance sur les cautionnements solidaires liés au Covid-19 indique qu’à moins qu’il n’ait commis une infraction plus grave au sens du code pénal, quiconque, intentionnellement,

  • obtient un crédit en vertu de la présente ordonnance en fournissant de fausses indication;
  • utilise les fonds en dérogation à l’article 6, al. 3.

est puni d’une amende de CHF 100’000 au plus.

Cette ordonnance du Conseil fédéral est une ordonnance de nécessité au sens de l’art. 185 al. 3 de la Constitution et fait office de loi. Sa durée de validité est limitée à six mois, ensuite elle sera remplacée par une loi fédérale urgente au sens de l’art. 165 Cst.

Qu’en est-il du rapport de révision si un des points susmentionnés se présente ?

La violation de cette ordonnance, sur le fait d’obtenir un crédit auquel il n’était pas possible d’accéder si ladite ordonnance avait été respectée, engendrera des comptes non conformes à la loi et aux statuts. Lors d’un contrôle restreint, le réviseur atteste qu’il n’a pas constaté d’élément permettant de conclure que les comptes annuels ne sont pas conformes à la loi et aux statuts. Dès lors, si un élément n’est pas adéquat selon cette ordonnance, qui fait force de loi, les comptes annuels ne seront pas conformes à la loi et une indication dans le rapport de révision devra être émise.

En contrôle ordinaire, le réviseur devra indiquer une opinion d’audit défavorable.

Qu’en est-il de la responsabilité ?

L’article 18a de l’ordonnance précise que les organes ainsi que toutes les personnes qui s’occupent de la gestion ou de la liquidation répondent personnellement et solidairement à l’égard des autres créanciers, de la banque créancière, de l’organisation de cautionnement et de la Confédération du dommage qu’ils causent.

En tant que réviseur ou conseillé de votre entreprise, nous sommes liés par la responsabilité. Dès lors nous serons contraints d’indiquer les informations justes dans nos rapports de révision.

En tant que dirigeant de votre entreprise, vous êtes lié par la responsabilité personnelle et solidaire si vous contrevenez à cette ordonnance fédérale de nécessité.

 

Il faut relever que les prêts Covid-19 sont accordés sans étude du dossier par la banque et sont octroyés dans le seul but de permettre aux entreprises de survivre durant cette période de crise. Dès lors, il est légitime qu’il y ait un cadre stricte.

La situation étant différente pour chacun, il faudra faire un point de situation régulier. Dès que ce crédit cautionné ne sera plus utile, il faudra veiller à le rembourser. Ainsi les entrepreneurs pourront prendre des décisions d’investissements ou de distributions de dividende librement.

Nous sommes à vos côtés afin de faire le point de la situation avec vous. C’est avec plaisir que nous vous accompagnons afin que vous soyez bien informés.

Liens utiles :

Easygov_Crédit COVID-19

Ordonnance sur les cautionnements solidaires liés au COVID-19_état au 20 avril 2020

Commentaire sur l’ordonnance COVID-19_état au 14 avril 2020

FAQ concernant les prêts liés au COVID-19